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Eusebius et Florestan

Barenboïm dirige le West-Eastern Divan Orchestra : les sons et les parfums

20 Janvier 2015 , Rédigé par Eusebius et Florestan Publié dans #saison 2014-2015

Barenboïm dirige le West-Eastern Divan Orchestra : les sons et les parfums

De retour avec bonheur et excitation à la Philharmonie de Paris qui accueillait son premier orchestre invité : le West-Eastern Divan Orchestra. Tout un symbole, particulièrement fort dans le contexte actuel. Réunissant de jeunes musiciens venus d’Israël et de Palestine et des États arabes voisins (Jordanie, Liban, Syrie, Égypte), cet orchestre constitue une formidable utopie capable de nous faire croire en un futur meilleur, et qui nous prouve que la solution au conflit israélo-palestinien n’est plus politique et certainement pas militaire. Cet engagement pour la paix, Daniel Barenboïm, fondateur de cet orchestre en 1999 aux côtés du regretté Edward Saïd, le couple à une exigence musicale qu’il veut porter au plus haut. Si le West-Eastern Divan Orchestra ne peut rivaliser avec les meilleures phalanges internationales, il n’a en revanche cessé d’élever son niveau jusqu’à acquérir aujourd’hui une personnalité remarquable. L’exigence de Daniel Barenboïm se retrouvait dans le programme du soir.

Le Prélude à l’après-midi d’un faune de Claude Debussy flotte comme un parfum subtil et capiteux, le paysage est chaud et lumineux. L’acoustique permet de nous délecter de chaque intervention soliste. L’acclimatation à la Philharmonie se passe décidément bien, on est déjà chez soi. Dérive 2 de Pierre Boulez apparaît ensuite comme cérébral. Pendant 45 minutes, le matériau sonore n’évolue que très peu, petits éclats permanents dont l’incantation peine à se faire poésie. Sur les onze instruments en présence, le vibraphone et le marimba deviennent vite envahissants, nous laissant au regret de ne guère profiter du cor anglais, du basson et du violoncelle. Daniel Barenboïm adopte une gestuelle calquée sur celle du compositeur. Ce que l’oreille perçoit fait pourtant hésiter. Est-elle aussi précise et incisive ?

Comme pour le concert inaugural du 14 janvier, Maurice Ravel est à l’honneur le 19. Le chef en présente l’œuvre espagnole, agencée intelligemment en une symphonie imaginaire : Rapsodie espagnole (vaste 1er mouvement), Alborada del gracioso (Scherzo), Pavane pour une infante défunte (mouvement lent) et Boléro (finale roboratif). Bien loin d’une Espagne de carte postale, un espace infini aux mille couleurs et aux senteurs enivrantes nous enveloppe. Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir. Barenboïm en état de grâce fait ressortir subtilement chaque détail de l’orchestration, sublimée pour la première fois à Paris par l’acoustique de la salle. Le basson donne une aubade irrésistible, charmeuse. Pavane évanescente. Le Boléro révèle des crispations chez certains pupitres de l’orchestre qui ne rompent en rien l’élan de la montée implacable qui rend fou. Dirigeant bras croisés, laissant le plus de liberté possible à ses musiciens, Barenboïm ne reprend le contrôle que pour soigner les transitions entre chaque palier, progressant en reliant l’individu au tout.

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